AZF, 20 ans après : quelles avancées pour la culture de sécurité ?
Ce mardi 21 septembre 2021, nous commémorons les 20 ans de l’accident de l’usine AZF de Toulouse. Cet évènement, qui a fait une trentaine de morts et plus de 2000 blessés, a touché de plein fouet les habitants de Toulouse, mais plus largement a ouvert les consciences ‒ industrielles, politiques et citoyennes ‒ et fait naître une volonté de changement. 20 ans après la catastrophe d’AZF, qui a été à l’origine de la création de notre Institut, quel bilan peut-on tirer des avancées et perspectives en matière de culture de sécurité ?
Il n’appartient pas à l’Icsi de s’exprimer sur les causes profondes de l’accident d’AZF. Mais cette double décennie est l’occasion de faire, à partir de notre expérience, un bilan de l’évolution de la culture de sécurité ces 20 dernières années. Une contribution parmi d’autres à un débat que nous espérons large et constructif. D’autres réflexions et d’autres expériences d’acteurs des risques peuvent venir enrichir, tempérer, faire évoluer ce regard sur la culture de sécurité.
L’Icsi propose de revenir, au travers d’une série d’articles, sur 4 thématiques majeures qui ont pu ‒ ou auraient pu ‒ faire évoluer significativement la culture de sécurité ces 20 dernières années.
Des références à des publications et à d’autres articles vous seront proposées tout au long de votre lecture.
| 20 ans de culture sécurité à travers 4 thèmes majeurs |
#1. D’AZF à Lubrizol, une concertation citoyenne à relancer
L’accident de l’usine AZF à Toulouse a été à l’origine de nombreux dispositifs réglementaires, inscrits dans la loi Bachelot de 2003. L’objectif ? Faire de l’information des populations sur les risques majeurs un pilier des politiques de prévention, au même titre que la réduction du risque à la source, l’organisation des secours et la maîtrise de l’urbanisation. L’événement plus récent de Lubrizol à Rouen est de nature différente. Pour autant, le comportement immédiat des riverains du site - qui ne savaient ou ne comprenaient pas ce qui se jouait sur le site industriel - a bien démontré un essoufflement sur le volet de l'information et de la concertation.
#2. Une meilleure prise en compte des facteurs humains et organisationnels dans la prévention
Dans les années 70-80, la sécurité industrielle a d’abord reposé sur la fiabilité technique des installations et sur la formalisation des systèmes de management de la sécurité. Ces deux aspects de la prévention permettent aux industriels d’augmenter considérablement leurs performances sécurité, et ce jusqu’aux années 2000 qui marquent une période de stagnation. Emerge alors un troisième pilier des politiques de prévention : les facteurs organisationnels et humains (FOH) de la sécurité.
#3. Sous-traitance et sécurité : les enjeux d’une meilleure coopération entre donneurs d’ordres et sous-traitants
AZF, Lubrizol… la sous-traitance est souvent questionnée lors d’accidents industriels. Dans les esprits, externaliser une activité industrielle est signe de dégradation de la sécurité. Est-ce vraiment le cas ? Tout n’est pas tout blanc ou tout noir, il existe des bonnes pratiques pour parvenir à construire une culture de sécurité partagée entre donneurs d’ordres et sous-traitants. Mais des contradictions persistent. A long terme, le principe même de sous-traitance devra être repensé pour s’adapter au futur modèle des entreprises.
#4. Industrie du futur : vers de nouveaux modèles de sécurité ?
Après un bilan sur la concertation citoyenne, les facteurs organisationnels et humains ou la sous-traitance, nous vous proposons de conclure ce dossier thématique dédié aux 20 ans d’AZF par un sujet de prospective. Quelle sécurité demain ? Le monde change et les idées évoluent, et le prochain enjeu de l’industrie sera peut-être d’adopter de nouveaux modèles de sécurité. Portons notre regard vers l’avenir : quelles idées nouvelles la science nourrit-elle pour la sécurité de demain ?
L’Icsi : un projet collectif après AZF
Pourquoi l’Icsi propose ce regard à l’occasion de cette commémoration ? Parce que l’accident d’AZF est fondateur de la création de l’Icsi, et que l’Institut s’attache depuis près de 20 ans, avec ses membres, à développer la culture de sécurité.
Après l’accident d’AZF en 2001 et le débat national sur les risques industriels, M. Philippe Essig remettait au Premier ministre un rapport dans lequel on peut lire : « Il faut développer une culture de sécurité qui réponde aux exigences de notre époque. Non pas une culture de la peur ou de l’indifférence, mais une culture de la “connaissance responsable”, qui permette d’accepter les situations réelles dans lesquelles on vit, et “participative” pour fixer les choix d’actions pour l’avenir. »
C’est avec cet objectif, dans une démarche collaborative visant à associer le plus largement possible les différents acteurs concernés par les risques industriels, qu’a été fondé en 2003 l’Institut pour une culture de sécurité industrielle (Icsi).
De façon neutre et indépendante, les membres adhérents de l’Icsi ‒ qu’ils soient industriels, représentants d’organisations syndicales, de collectivités, membres d’associations, enseignants, chercheurs… ‒ participent collectivement au débat, à la capitalisation de bonnes pratiques et au développement de solutions opérationnelles pour la sécurité.