Qu’est-ce que la culture juste et équitable ?
La culture juste et équitable est un levier pour développer la culture de sécurité d’une organisation. Elle crée les conditions de confiance et de transparence, au service de la circulation de l’information. L’objectif final : faire progresser la sécurité.
Comment définir une culture juste et équitable ?
Définition : Une culture juste et équitable favorise la remontée des informations importantes pour la sécurité, en créant un climat de confiance et de transparence nécessaire à la libération de la parole.
Elle alimente une « culture apprenante », c’est-à dire la capacité de l’organisation à :
- comprendre en profondeur son fonctionnement réel,
- agir efficacement et mieux maîtriser les risques.
C’est une logique d’apprentissage et d’amélioration continue où l’information en matière de sécurité est clé. On va chercher à comprendre, en profondeur, ce qu’il se passe « réellement » sur le terrain.
Une longue construction de la confiance et de la transparence…
Pour que les informations remontent du terrain, encore faut-il créer les conditions de la transparence ! La transparence est d'ailleurs un des 7 attributs d'une culture de sécurité performante.
Or, celle-ci ne se décrète pas du jour au lendemain ! Elle se construit pas à pas sur le temps long et nécessite de créer un climat de confiance en :
- encourageant et valorisant les contributions positives et proactives pour la sécurité,
- levant la méfiance des individus à faire remonter les « mauvaises nouvelles ».
Une sécurité psychologique ?
Certaines entreprises évoquent la notion de sécurité psychologique, afin que chacun se sente en sécurité pour parler, y compris de ce qui ne se passe pas bien, pas comme prévu, pas comme attendu.
La culture juste et équitable permet de réduire la méfiance et la crainte des conséquences d'un signalement (« qu’est-ce qui va m’arriver si... »). En posant un cadre clair, les réactions du management et de l’organisation à ces situations sont connues et acceptées.
L’objectif : lutter contre le silence organisationnel !
Quand le silence organisationnel s’installe - une situation où les informations importantes pour la sécurité sont disponibles au niveau du terrain mais ne remontent pas – cela affaiblit considérablement la sécurité. Les situations à risque ne sont alors ni analysées, ni traitées, ni prises en compte dans les stratégies de prévention.
Quelles sont les informations importantes à faire remonter ?
Ce qui se passe mal ou « pas comme prévu » :
- Les accidents bien sûr… sans oublier les presque-accidents,
- Les situations et évènements à « haut potentiel de gravité »,
- Les anomalies, dysfonctionnements, situations dégradées,
- Les écarts aux règles,
- Ou toute situation inhabituelle, même si les équipes se sont adaptées aux aléas et ont su gérer une situation à risque.
Ce qui se passe bien :
- Les bonnes pratiques,
- Les initiatives, les contributions positives à la sécurité,
- Les adaptations pertinentes aux situations dégradées et aux imprévus,
- Les succès rencontrés par les équipes sur le terrain.
Regard d’ailleurs
Selon Eric Hollnagel, professeur à l’Université du Sud Danemark et fondateur du courant « Safety 1- Safety 2 », une immense majorité des situations se déroulent en sécurité. Or, elles sont très peu exploitées dans les processus de retour d’expérience… Un réservoir d’apprentissage à aller explorer de toute urgence, et un axe à ne surtout pas négliger dans une approche culture juste et équitable !
Libérer la parole, un vrai défi !
Quoi qu’on en dise, l’entreprise est en réalité peu friande de mauvaises nouvelles, les salariés auront tendance à les taire : peur de la sanction, de la réaction du chef, peur d’être perçu comme un mauvais professionnel, du regard des collègues… il existe énormément de facteurs qui expliquent ce comportement de protection.
Les managers ne sont pas en reste et sont souvent perçus comme de bons managers lorsqu’ils résolvent eux-mêmes les problèmes, et moins quand ils les remontent à leur propre hiérarchie.
Et de l’autre côté du miroir, la reconnaissance et la valorisation des initiatives, des comportements proactifs ne sont pas vraiment un trait culturel fort en France : « il/elle a juste fait son travail ».
Alors, quels leviers activer ?
Dans les entreprises, une démarche de développement de la culture juste et équitable s’organise autour de 3 leviers :
- Reconnaitre les contributions positives et proactives pour la sécurité,
- Définir et partager un cadre clair et connu de tous autour de grands principes :
o admettre le droit à l’erreur,
o ne pas chercher un coupable,
o distinguer ce qui relève de l’erreur et de la transgression,
o distinguer ce qui relève de l’individu par rapport aux causes organisationnelles, clarifier des lignes rouges à ne pas franchir… - Accompagner les managers, pour les aider à adopter des réactions appropriées et homogènes face aux écarts.
A retenir
Mettre en place une culture juste et équitable, c’est :
- considérer l’information comme un trésor d’apprentissage pour la maîtrise des risques,
- mettre en œuvre un climat de confiance et de transparence pour protéger et rassurer ceux qui détiennent l’information, afin de libérer la parole,
- traiter au bon niveau ces informations pour améliorer concrètement la maitrise des risques, en particulier les risques graves, mortels et technologiques majeurs.